composer
l’image

Les régimes de production de la musique commerciale sont largement bousculés depuis l’extension des réseaux, qu’il s’agisse d’Internet ou de la télévision et de la radio, et suivent plus ou moins parallèlement les métamorphoses du commerce. Ainsi, dans les années 1980 en Allemagne, une chaîne de télé-achat, QVC, s’est rendu célèbre en concurrençant le commerce traditionnel d’une manière brutale, directe, avec un succès sans précédent. Or la musique contemporaine (toutes les musiques) obéit aussi à un certain marché, où la fraicheur des idées, la technologie, l’image du compositeur façonnent dans une certaine mesure la réception du produit « œuvre ». C’est ce rapprochement que Nico Sauer a mis en scène dans Telefon Centrum Ep. 1 : dans une parodie de vente en ligne, le produit est une brosse à dent présentée comme une guitare. C’est la continuation d’un travail critique qui a commencé avec son webshop Neumusik24, où Sauer vendait en ligne des idées musicales pour compositeurs, sous forme de sons, de concepts, de schémas. Se posait là le problème de l’authenticité de l’idée par rapport à l’auteur, puisque dans la musique de création, l’idée, le projet sont primordiaux. Neumusik24 vendait donc l’invendable, dans le but de démonter les rouages de la production musicale et ses soubassements idéologiques (valeur de la personnalité, rôle du compositeur, authenticité de l’œuvre). Telefon Centrum pose à nouveau les mêmes questions, cette fois directement par la fusion entre un site de vente en ligne et son but mercantile affiché et un instrument de musique, dénaturé, dévoyé, parodié, image peut-être nostalgique d’un outil artistique.