Depuis 2012, les apparitions de Wilhem Latchoumia ont marqué le public de Musica. Charisme, puissance pianistique, charme et engagement personnel. Il revient en 2015 auréolé de plusieurs prix obtenus à l’occasion de ses enregistrements récents, et notamment celui consacré à Wagner et ses transcripteurs.
« Avec le mythique accord de Tristan, Wagner ouvre les portes de la musique moderne, que je joue beaucoup. » En quelques mots les raisons de ce récital mêlant répertoires classique et contemporain – fil conducteur de cette édition 2015 – sont données. Wagner moderne visionnaire autant que compositeur des mythes germaniques confronté à quelques littératures actuelles.
Cet accord de Tristan (celui qu’on retrouve dans la courte et testamentaire Élégie en la bémol), ouvre donc vers des horizons inattendus, celui de Gérard Pesson par exemple, compositeur à l’univers sonore si ténu qu’il se situe à mille lieues du titan bavarois. En haut du mât saisit l’air du marin, laissé sans harmonie par Wagner et en propose un contrepoint qui met en valeur la monodie originale.
On peut surfer aussi sur une vague spectrale avec le court Tombeau de Messiaen du compositeur anglais Jonathan Harvey (1939-2012). « Olivier Messiaen était un “protospectraliste”, en ce sens qu’il était fasciné par les couleurs des séries harmoniques et leurs distorsions, y trouvant un prisme de lumière. » Le piano résonne ici avec l’électroacoustique.
Tout oppose enfin Wagner aux approches pianistes de Iannis Xenakis. Ici nul romantisme, mais une approche stochastique des figures sonores. Dans Mists, Xenakis introduit l’aléatoire, crée des arborescences complexes et produit un univers pianistique à nul autre pareil.