Quatuor Diotima
création française
commande : Wigmore Hall with the support of André Hoffmann, president of the Fondation Hoffmann, a Swiss grant-making foundation / The Dina Koston and Roger Shapiro Fund in the Library of Congress / ECLAT Festival Stuttgart / Festival Musica Strasbourg / Philharmonie Luxembourg / Klangspuren Schwaz / November Music
quatuor à cordes n° 3
Fin de la manifestation à 18h30
Dans ses concerts, le Quatuor Diotima aime associer des classiques du xxe siècle à des œuvres récentes dont il est souvent le créateur. Pour sa huitième participation à Musica, il ne déroge pas à ses habitudes, puisque Unbreathed de Rebecca Saunders (2017), en première audition française, côtoie Farrago de Gérard Pesson (2013) et le Quatuor à cordes n° 2 de Ligeti (1968). Un programme qui couvre les cinquante dernières années de l’histoire du quatuor et témoigne de l’inaltérable vitalité du genre.
« Quand on compose, chaque note ou geste encore et encore est passé au tamis, pesé contre son fond de silence », déclarait Saunders en 2006. Cette préoccupation l’habite toujours aujourd’hui si l’on en croit Unbreathed, musique secrète et fantomatique, souffle hanté par le vide et le silence, coloré par d’infimes variations de timbre et de dynamique, parfois par des accents de colère, mais sur lequel la mélancolie n’a pas de prise. En tête de la partition, des citations de Murakami, Ed Atkins et Beckett introduisent à cet univers sans pour autant le déflorer. On ne s’étonnera pas de retrouver ici l’auteur de L’Innommable (roman dont provient l’une des épigraphes), déjà inspirateur de plusieurs partitions où Saunders explorait le potentiel infini du silence.
Cette tentation de l’effacement se retrouve chez Pesson, lequel présente Farrago comme une sorte de récit tissé de « silence adhésif », mais animé de l’énergie d’un « temps précipité ». Le titre latin («mélange de plusieurs sortes de grains ») fait référence au réservoir de trente-trois éléments qui, dans l’œuvre, interagissent les uns sur les autres, telles des associations d’idées entretenant un souvenir. À ce flux menant d’une idée vers une autre s’adjoint le raffinement d’une texture « cousue maille par maille », comme le suggèrent les dernières lettres du titre : « ago », « aiguille » en italien.
Ligeti, lui, comparait ses denses intrications polyphoniques aux aiguilles de pin d’un tableau de Van Gogh. Dans son Quatuor n° 2, il exploite cette technique parallèlement à d’autres systèmes d’écriture (jeu heurté, dérèglement rythmique). Une synthèse nécessaire avant de se lancer dans de nouvelles aventures.