Jeunes talents, interprètes

programme

Ensemble de musique contemporaine de l'Académie supérieure de musique de Strasbourg-HEAR

Direction musicale | Jean-Philippe Wurtz

Edgard Varèse
Déserts (1950-54 / rév. 1960-61) / 26’
-- entracte --
Frank Zappa
Dupree's Paradise (1982-84) / 8’
John Adams
Chamber Symphony (1992) / 23’

Fin de la manifestation à 12h15

En 1953, Zappa découvre la musique de Varèse au moment où celui-ci travaille à Déserts. Il n’oubliera jamais ce choc d’adolescence, comme en témoigne Dupree’s Paradise, enregistré pour la première fois en 1973, puis arrangé pour l’Ensemble intercontemporain. Américain installé lui aussi sur la côte Ouest, John Adams jette un autre regard sur l’avant-garde européenne, en l’occurrence sur Schoenberg qui lui inspire une Chamber Symphony aussi vivifiante qu’ironique.

Zappa avait seize ans lorsqu’il écrivit à Varèse pour lui exprimer son admiration et son désir de devenir compositeur. À ce moment-là, il ne connaissait pas encore Déserts qui, lors de sa création à Paris en 1954, déclencha un scandale monumental. Varèse avait osé, pour la première fois, alterner entre des sons fixés sur une bande (élaborée dans les studios de la R.T.F.) et les timbres acoustiques d’un ensemble instrumental. Si l’œuvre évoque « les déserts physiques, du sable, de la mer, des montagnes et de la neige, de l’espace extérieur, des rues désertes dans les villes », elle transpose surtout la situation du créateur d’avant-garde, « seul dans un monde de mystère et de solitude essentielle ». Quand un journaliste demanda plus tard à Zappa si Varèse serait mieux reçu à leur époque, le rockeur répondit qu’il faudrait pour cela que l’auteur de Déserts entre en scène avec des ongles peints en noir, des cheveux orange, des lunettes rigolotes et un pantalon trop court…
Fasciné par les innovations européennes, il joue quant à lui sur l’ambiguïté entre expérimentation et culture du divertissement. Dans la notice de Boulez Conducts Zappa, qui contient Dupree’s Paradise, il insiste sur la dimension récréative de l’album, affirmant qu’il ne s’agit en rien d’une « forme d’expression artistique quelle qu’elle soit ». Mais le plaisir a l’ivresse pâteuse, si l’on en croît son commentaire de Dupree’s Paradise (nom d’un bar sur Avalon Boulevard à Watts) : dans ce tableau d’une jam-session à six heures du matin, des policiers côtoient des musiciens, des ivrognes et d’autres individus totalement délabrés.
Adams se montre plus critique à l’égard des courants modernistes du xxe siècle européen, et notamment à l’égard de l’École de Vienne. Dans sa Chamber Symphony sur-vitaminée, l’héritage de la Kammersymphonie op. 9 de Schoenberg se double d’une référence aux dessins animés trépidants des années 1950.

Jean-Philippe Wurtz DR
Jean-Philippe Wurtz
DR

En partenariat avec l'Académie supérieure de musique de Strasbourg-HEAR

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